Rivardo Niyonizigiye

Burundi : des bus et des billets qui se ressemblent

Au Burundi, le transport en commun est fait par des bus à majorité privés. Certains de ces bus sont tellement vieux qu’ils ne cessent pas de tomber en panne en cours de route.  Les propriétaires de ces bus et les agents de l’ordre ne se soucient jamais de  l’impact négatif de ces bus. A ces vieux bus s’ajoutent des billets aussi vieux qu’eux. Un malheur qui ne vient jamais seul !

Ce matin là, je ne me sentais pas à l’aise du tout. Il a fallu que je prenne un bus qui me dépose près de mon lieu de travail. Le bus de 6h50 était déjà plein. Je me dirigeais vers le suivant qui n’avait que deux personnes. Une s’asseyait derrière le chauffeur. Et un autre s’était soigneusement pointé dans le coin derrière, partie gauche. Je décide de m’asseoir  tout près du chauffeur.

Ce fut le début de mon cour de mécanique. Une aventure dont je ne me souvenais que quelques notions apprises en 9ème dans le cours de technologie. Toutes les parties du bus se voyaient à l’œil nu : le volant, le frein, etc, tout était visible. Pour démarrer le bus, on devait d’abord pousser. Le chauffeur n’avait pas besoin de clé de contact, joindre deux fils suffisait pour mettre le moteur en marche. Après quelques 800 mètres, le moteur s’arrête. On poussa encore.

Une femme s’asseyait à ma droite, entre le  chauffeur et moi. Quand le chauffeur démarra, elle le regarda et se tourna vers moi et on éclata tous de rire.  Ensuite, on se lança dans un débat qui ne portait que sur la vieillesse des bus de transport dans la ville de Bujumbura. On se demandait comment une personne peut mettre une chose trouvée à la poubelle dans une place publique comme la rue. Le débat s’est vite généralisé dans tout le bus. Le chauffeur semblait ridicule mais il continuait son chemin. C’est la faute de son boss, le propriétaire du bus.

Le moment de payer arrive. Les billets qu’on sort de nos poches font pitié. Les billets de 100 francs et 500 francs sont aussi vieux que le bus qui nous transporte.  Le convoyeur n’avait que ces billets seulement. Certains étaient froissés à jamais quand les autres se déchiraient au moindre frottement. D’autres encore étaient à moitié déchirés. Ceux qui n’avaient pas exactement la somme pour le déplacement devaient avoir les vieux billets comme échange.

Le billet de cent francs encore neuf
Les billets de cent francs actuellement

 

Un homme donna un billet de 10 000 francs. Le convoyeur trouva difficilement son échange. Quand il lui donne, le papa refusa catégoriquement quelques billets et jura qu’il ne va pas quitter le bus sans qu’on lui donne des billets transportables. Le bus fut bloqué pendant une dizaine de minutes. Les passagers insultaient le chauffeur quand le papa insultait le convoyeur. Les passagers deviennent tous très furieux. Le papa finira par accepter.

A qui la faute ? Le convoyeur, lui, ne fabrique pas l’argent. Il donne ce qu’il a. Les passagers ne peuvent pas toujours avoir les tickets exacts pour le bus. Ils ont toujours et auront toujours besoin d’échange. En plus, ceux qui ne veulent pas accepter les demi-billets et les billets troués tel un filet ont raison. Prendre un billet qui ne va pas durer une heure dans ton porte monnaie, un billet qui se déchire au premier contact avec l’air ou la sueur équivaut à ne rien prendre.

Après les vieux bus viennent les billets de cent francs et de cinq cent francs. Les propriétaires de ces bus veulent de l’argent mais optent pour polluer la nature. Un mauvais chemin. Les agents de la sécurité routière, eux, semblent ne rien voir. A y regarder de plus près, l’économie burundaise souffre. Mais les burundais aussi souffrent de l’ignorance. Il faut être raisonnable. Il y a des intellectuels qui savent plus  sur la pollution, pourquoi restent-ils muets devant cette mort lente ? Les décideurs, que font-ils à propos ? Et quant à nous les passagers, pourquoi nous suicidons-nous ? Et si on refusait d’entrer dans les vieux bus qui risquent nos vies ? Concernant les billets, je n’ai autre mot à dire que ‘Nous voulons des billets neufs’ auprès de la banque centrale.


Au Burundi, le nouvel an n’est plus célébré à la burundaise

Peut-on parler d’une évolution ou d’une perte ? La célébration du nouvel an à la burundaise a petit à petit disparue, pourtant, elle était meilleure et valeureuse. Les Burundais ont embrassé la nouvelle forme venue de l’occident qui ressemble à une folie tout simplement.

Après la colonisation, certaines valeurs ont été abandonnées par les burundais surtout les soi-disant « lettrés » qui n’ont pas tardé à embrasser les valeurs du colonisateur. Parmi ces valeurs abandonnées, la célébration et le sens donné au nouvel an.

Le nouvel an burundais

Au Burundi, des opinions divergent sur la date exacte de célébration du nouvel an. Certains la placent au mois de juin (Ruheshi), le mois des récoltes ; d’autres le placent au mois d’octobre après la fête nationale, « Umuganuro » et d’autres encore le placent au mois de décembre. Le nouvel an était l’occasion de remercier le Tout Puissant, créateur  qui a pu garder la famille saine et sauve. Le chef de la famille dirigeait les prières, souvent accompagné d’un représentant de Kiranga sur la colline. On n’avait pas de discours comme tels, mais plutôt, des prières, des paroles de poids et des louanges à Imana, des souhaits pour la nouvelle année. Ils s’abstenaient de dire quoi que ce soit à propos du malheur qui aurait survenu tout au long de l’année passée.

La nourriture qu’on mangeait le jour du nouvel était très particulière. On préparait de la pâte de sorgho ou d’éleusine, de la viande et des légumes. On s’asseyait par ordre du plus ainé au plus jeune. Le chef de famille prenait un morceau, mangeait, ensuite, il donnait à chacun un après l’autre du plus âgé au plus jeune. Si un enfant est trop jeune pour manger, c’est la maman qui mangeait à sa place. « Kurya umwaka » (diner pour le nouvel an) avait une grande signification et surtout une force dans la vie familiale.

Le jour du nouvel an, on s’abstenait de faire ce qui ne convient pas : insulter, manger la nourriture de mauvaise qualité, etc. de peur que cela se répète tout au long de l’année. On devait mettre de nouveaux habits, se laver, etc.

Aujourd’hui, on prie, on mange, on célèbre, on veille dans les boites de nuit ou dans les Eglises ; c’est bon a voir. Mais, ce qui est évident, c’est que la manière dont les Burundais célébraient le nouvel an a changé. Les pratiques ne sont plus les mêmes malgré quelques similarités. Le sens donné à cette célébration a totalement changé. Chaque acte était symbolique et calculée dans le Burundi ancien, mais aujourd’hui, c’est de la folie. Le nouvel an est comme une occasion pour l’excès. La nuit du Nouvel an, c’est la plus dure des autres nuits : accroissement des accidents de roulage, ivrognerie, et beaucoup d’autres insolites.

Tout cela montre combien les Burundais d’aujourd’hui ont été déconnectés de leur passé et surtout de leur croyance. Ces actes bizzares n’avaient pas de place le jour du nouvel an avant l’arrivée des cultures occidentales.

 

 

 


Burundi : tentative d’assassinat du Conseiller du Président

La nuit de ce lundi 28 novembre 2016, Willy Nyamitwe, le conseiller à la Présidence chargé de la communication échappe à une tentative d’assassinat. Un acte barbare, une voie sans issue, j’estime.

 

Encore une autre  honte
Une honte grave
Une honte pour nous les citoyens burundais
Une honte pour le pouvoir et son opposition
Une honte pour les rebelles et les politiciens
Une honte pour le Burundi.

Penser qu’on peut rompre la vie de son opposant
La vie qu’on ne peut jamais mettre en place
La vie qu’on a tous trouvée sur terre
N’est-ce pas une honte ?

Quand tuer devient une solution
Préconisée par le pouvoir qui emprisonne et torture
Préconisée par les rebelles qui se vengent
Et que la tolérance n’est plus
Le dialogue, déstabilisé sinon contesté, boycotté,
N’est-ce pas une honte ?

Tuer c’est tuer, ça n’a jamais bâtit
On l’a vu dans notre histoire très proche
L’histoire qui n’est pas passée inaperçue, j’estime
L’histoire qui nous a tellement blessés
Celle qui nous a pris nos êtres chers
Nos cousins, nos pères, nos amis d’enfance…

Aujourd’hui,  le Burundi a vu des tueurs naître au grand jour
Ils ne cessent de se reproduire :
D’un côté, on a des tueurs en armes
De l’autre, on a des tueurs en paroles
Ces derniers sont plus terribles que les autres

Les tueurs en paroles sont plus méchants  et difficiles à échapper
Les tueurs en paroles sont plus influents
Comme ce sont eux qui amplifient la tension
Qui mène à n’importe quelle connerie
Comme celles qu’on ne cesse de voir.

Tuer n’est qu’une faiblesse
De l’esprit de celui qui commet cet acte ignoble
Quand on tue le corps de son prochain
On tue nos âmes sans le savoir
On brûle nos esprits qu’on voulait soulager.

Voici l’exemple d’une absurdité :
Si ce conseiller à la présidence meurt
Pensent-ils que le Burundi sera guéri ?
Pensent-ils que le pays sera en paix ?
Était-il le seul ennemi ? La seule barrière ?
Il n’est pas innocent, mais il ne mérite pas la mort.

Les accusations qui vont suivre
Les fausses accusations fondées sur des soupçons
Suivies par des arrestations et des tortures
Ne font qu’empirer la situation
Et tout remettre à zéro
Toujours le tour du cercle vicieux !

Un message à tous les burundais acteurs dans  cette impasse :
Le pays ne trouvera jamais de paix
Sans la participation de tous :
Imbonerakure et  politiciens en exil.
Toute tentative d’exclure l’un ou l’autre
Ne fera qu’ajouter de l’huile sur le feu.